Les données des consommateurs ou des citoyens, un « or noir » pas toujours facile à valoriser

Le 12 novembre, l’Institut intelligence et données (IID) de l’Université Laval, Entrepreneuriat Laval et SOVAR organisaient un webinaire sur l’usage responsable des données : un enjeu d’importance, tant en recherche qu’en entrepreneuriat. Bref résumé de cette activité. 

Le 12 novembre, l’Institut intelligence et données (IID) de l’Université Laval, Entrepreneuriat Laval et SOVAR organisaient un webinaire sur l’usage responsable des données : un enjeu d’importance, tant en recherche qu’en entrepreneuriat. Dans cet article, un survol des considérations qui y ont été évoquées vous est proposé, entre vulgarisation des enjeux éthiques ou légaux, et expériences d’entrepreneurs ayant été confrontés à l’usage de données de consommateurs.

Les données des consommateurs ou des citoyens, un « or noir » pas toujours facile à valoriser

Les données, dans le développement de projets d’innovation basés sur les technologies et le numérique, font de plus en plus figure d’incontournables. Après tout, ces données sont « la matière première du numérique », comme le signale Pierre Prévot, scientifique de données à l’Institut intelligence et données (IID) de l’Université Laval.

C’est ainsi un « or noir » qui peut apporter beaucoup, dans la mesure où l’on sait comment en favoriser un usage responsable alors que nos sociétés sont de plus en plus conscientisées quant aux risques qui sont associés à leur usage – enjeux de cybersécurité, préoccupations relatives au consentement libre et éclairé des usagers, risques quant à la confidentialité des données, ou encore inquiétudes rattachées à l’équité ou aux biais qui peuvent leur être associés. « Les systèmes que l’on construit à partir des données sont aussi bons que les données sur lesquelles on va les construire! Si les données sont biaisées à la base, si elles représentent une réalité qui est rattachée à des préjugés, et bien, ces tendances vont se reporter dans les systèmes qu’on va générer… On va ainsi créer des systèmes avec des biais intrinsèques qui pourraient amener, par exemple, à de la discrimination », explique Pierre Prévot.

De ce fait, pour le professionnel de recherche, il importe que les entrepreneurs et autres utilisateurs soient prudents dans leur utilisation des données massives. « Il n’est jamais anodin d’utiliser des données, et il est possible de se laisser déborder par celles-ci, et de faire des gros dégâts », conclut-il.

Un cadre législatif nécessaire pour supporter l’usage des données

Évidemment, pour éviter les dérives et encadrer leur usage, diverses approches peuvent être mise en place quant à l’utilisation des données. « On peut miser sur un système d’intelligence artificielle explicable et fiable, identifier la personne responsable de tout incident et assurer son imputabilité, adopter un cadre d’évaluation de l’incidence algorithmique et de ses impacts sur la vie privée, ou encore mettre en place des règlements ou des cadres législatifs », avance Schallum Pierre, chargé scientifique et éthique à l’IID. Au final, selon lui, la clef est de pouvoir générer une confiance de la part de la population envers l’usage des données ainsi que les systèmes et technologies qui leurs sont liées. « De ce fait, c’est essentiel d’encadrer la façon dont les entreprises, par exemple, gèrent ces données-là ».

L’éthicien cite, par ailleurs, diverses législations américaines (CCPA), européennes (RGPD) ou canadiennes (PIPEDA) qui ont été mises en place ou développées, afin, justement, d’accompagner cet usage. Au Québec, c’est le Projet de loi 64 (PL64) qui devrait tenir ce rôle – une législation qui agit d’abord et avant tout quant au consentement, qui deviendra une exigence sine qua non pour la collecte de données rattachées aux individus. « Une fois la loi mise en place, lorsqu’on va chercher un consentement, il faudra que les implications de ce consentement soient expliquées de façon cohérente, claire, concise et complète. Il faudra préciser les différents aspects associés à l’usage ou au transfert des données ou encore expliquer en quoi leur collecte est nécessaire », indique Schallum Pierre.

Pour le professionnel, le PL64 viendra ainsi bonifier les droits des citoyennes et citoyens, autant que renforcer l’imputabilité des entreprises et usagers des données. « Pour ceux qui veulent travailler en entrepreneuriat et innovation en lien avec l’IA, le projet de loi permettra d’avoir des guides et des stratégies claires afin de pouvoir avancer ».

Face aux données, des stratégies entrepreneuriales diversifiées

Actuellement, pour les entrepreneurs, il n’est pas toujours facile de bien encadrer la collecte de données. Cela en pousse certains, comme Isabelle Lopez, présidente-directrice générale de MySmartJourney, à tout simplement choisir de ne pas les collecter. « Nous, on a choisi d’être le plus anonyme possible. Oui, on a accès à des statistiques. Oui, on peut savoir ce qui se passe dans les applications que l’on développe, mais on évite de les stocker, de les conserver, on en garde le moins possible et on choisit aussi d’intégrer dans nos produits des applications tiers qui, elles aussi, préconisent l’anonymisation », explique l’entrepreneure.

Son entreprise développe des solutions rattachées à la ludification de l’expérience-utilisateurs par le biais de la diffusion de contenus multimédias dans des lieux publics. « Les sanctions sont réelles, et les clients qui choisissent d’utiliser nos solutions nous font confiance – il faut donc faire le maximum pour les protéger, et protéger les utilisateurs! », ajoute Isabelle Lopez.

À l’inverse, chez Stamped.AI, qui développe des solutions d’analyse et d’audit des données financières, l’utilisation des données-utilisateur est au cœur du modèle d’affaire – l’organisation fournit en effet une évaluation indépendante permettant, entre autres, d’identifier des anomalies financières, ou de faciliter les suivis d’investissements. « On n’a pas le choix d’aller chercher toute l’information dont on a besoin, et il nous est impossible d’avoir un modèle qui soit 100% anonyme. Notre solution a donc été de bâtir un modèle de type ²Fort Knox², dans lequel on est capables de conserver un grand nombre d’informations confidentielles de façon sécuritaire », explique le président-directeur général Simon Langlois.

Il va sans dire, tant l’évolution des cadres législatifs, que le rythme d’innovation technologique, viendront offrir de nouveaux outils ou approches pour les innovateurs, en recherche ou en entreprise, au fil des mois ou années à venir. D’ici là, selon les divers conférenciers du panel, il importe d’agir de façon responsable quant à l’usage des données consommateurs, et de ne rien laisser au hasard. Comme le disait, en introduction à l’activité, le directeur de la Science et de l’Innovation chez SOVAR, Jean-François Haince : « Il faut bien connaître les règles du jeu ».

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